Privilèges et immunités : DSK et les Ambassades

Publié le par cassiano

L'expression sonne mal : les "privilèges et immunités" diplomatiques ou autres. L'époque n'est pas au respect de certaines zones qui échappent au pouvoir de l'Etat ou à celui de la foule entraînée par les uns ou les autres.

 

A Téhéran, l'Ambassade des Etats-Unis a été occupée en 1979, avec à la clef une longue prise d'otages. Puis à nouveau, en 2006, saccage de l'Ambassade du Danemark... et les Etats de l'UE n'ont même pas décrété le rappel de leurs Ambassadeurs. Les Ambassades ont été à nouveau l'objet d'attaques en 2011, au Caire (Ambassade d'Israël) ainsi que plus tôt, à Tripoli. Des diplomates sont assassinés à Kaboul et ailleurs dans le monde.

 

Or, il faut le rappeler, le fait que le représentant officiel d'un autre gouvernement soit intouchable, sur le territoire d'un autre Etat, même (et surtout) "ennemi", c'est une loi vieille comme la civilisation. Cette règle a prouvé que son respect était indispensable pour abréger les guerres et les crises. Une règle évidente, en deçà de laquelle commence la barbarie.

 

Il faudrait que la communauté internationale et, avec elle, les média, réapprennent le caractère gravissime de l'atteinte au drapeau blanc, au pavillon de celui qui est là pour parlementer. On peut l'expulser, mais on ne doit pas l'attaquer. On peut fermer une Ambassade, mais on ne peut pas l'occuper, la fouiller, la piller. Face à de telles atteintes, la réaction doit être rapide, unanime et sans la moindre ambiguïté.

 

L'immunité et les privilèges sont aujourd'hui toujours moins le fait du droit (le droit des Etats, des peuples représentés par un diplomate ou un chef d'Etat) mais celui de l'argent et de la force. Un chef mafieux peut, en principe, s'en tirer. Qui a les moyens de s'évader fiscalement et physiquement peut se mettre à l'abri de toute poursuite. L'immunité s'achète à coup d'avocats et de gardes privés.

 

L'une des terribles leçons de l'affaire DSK aura été que ce ne sont pas ses fonctions à la tête du FMI qui l'auront protégé d'accusations éventuellement abusives, mais l'argent de son épouse : logement de luxe, avocats de luxe, campagne médiatique, contre-enquête.

Qu'aurait-on dit si le Président de la Banque mondiale avait été arrêté à Pékin sur la base d'accusations d'une caporale de l'Armée chinoise ? ou à Téhéran sur la base de la confession d'une femme de chambre afghane ? Les immunités servent aussi à cela, protéger ceux qui exercent des fonctions importantes non du châtiment et du jugement, mais de l'abus des autorités locales.

Publié dans Droit et société

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